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21 mai 2009

Asseyons-nous, prêt pour la poésie




I. Le But Suprême de la poésie


La fixation de l'esprit sur des sujets élevés et sublimes amène une élévation et une purification graduelles de la conscience. Cette élévation et cette purification amènent une vibration plus rapide des véhicules de conscience, qui produit à son tour un affinement de la matière où ces véhicules s'originent. C'est pourquoi l'homme de poésie devient plus beau et plus fort. Son âme grandit et monte vers l'étoile de son être. Les femmes se lovent à ses pieds. Les enfants le veulent pour père. Les animaux le regardent d'un regard curieux. Les femmes, surtout, font mille folies pour recueillir un peu de sa semence, dans les filaments de laquelle elle prétendent lire l'avenir et percer les reflets d'un reflet de la face de la divinité.

La poésie est une pratique antique, immémoriale, comme les mythes et les cultes obscènes. Elles est connue de tous ceux qui se sont efforcés de réaliser leur possible intérieur et de résoudre l'énigme de l'univers. Elle est connue de tous ceux qui n'ont pas renoncé à tirer au clair ce qui les hante et les brûle, que ce soit par le rite de poésie, le rite de sang ou celui de se faire couler soi-même la semence. Aux questions éternelles et essentielles ne peut être répondu que du dedans ; ainsi, toute solution réside dans les profondeurs de la matière de l'homme. Que la matière vibre un peu fort et elle donne l'esprit. Qu'elle vibre un peu plus et elle donne la poésie. Si elle vibre vraiment trop c'est de la semence qui se répand et qu'il faudra brûler en holocauste.

Au début, on peut voir dans la poésie une habitude irréfléchie, pour ainsi dire subconsciente, et de ce point de vue elle est utilisée par tous ceux qui, dans leur vie quotidienne, par exemple lorsqu'ils conduisent en sens inverse ou se rasent les yeux fermés, agissent sans le savoir conformément au But Suprême qui consiste à devenir plus beau. Cette "poésie réflexe" du premier stade peut n'occuper que quelques instants de la journée : elle façonnera quoi qu'il en soit l'être et le corps.

En somme, nous pratiquons tous plus ou moins la poésie, dès lors que nous manoeuvrons notre squelette dans une attitude tendue vers le Beau. La poésie n'est pas, comme on le suppose parfois, un art difficile, antinaturel. Cette idée répandue que la poésie résiderait dans des processus abstrus, ésotériques, extraordinaires, résulte de la lecture de mauvais livres et des enseignements dangereux dispensés dans les facultés. La poésie consiste dans une exaltation de la beauté du corps et des pouvoirs innés du cerveau. A travers un apprentissage simple et la mise en oeuvre de techniques naturelles, cette beauté et ces pouvoirs peuvent être développés plus que la moyenne par toute créature pensante, même une femme.

Il est vrai que, d'une manière générale, la poésie contemporaine est souvent le fait de gens hideux, efféminés et en mauvaise santé. C'est là le fruit de l'hérédité d'ancêtres qui, pendant des milliers d'années, se sont abstenus de tout travail, de culture physique et d'alimentation. Une telle lignée d'ancêtres et de pareils principes d'existence sont irréalisables pour la plupart des gens ; de là le risque d'accidents nerveux dans l'emploi des méthodes poétiques contemporaines intensives ; de là vient que de nombreux poètes d'aujourd'hui, surtout en Occident, surtout en France, ont l'air de poissons mourant au soleil et que leur poésie ne s'entend vraiment que privé d'air.



II. Comment faire de la poésie


a) Préparation lointaine

La poésie, d'après ce que nous avons vu du But Suprême, est une activité éminente qui sollicite le corps et l'esprit. Pour atteindre son objectif, elle ne devrait pas être entreprise sans préparation. Le véritable succès de la poésie dépend ainsi, pour une large part, des dispositions habituelles du praticien.

Dans les couvents et les monastères, où la poésie est plus répandue qu'on croit (voyez Jean de la Croix ou sainte Thérèse), les préparatifs commencent la nuit. Par le portail du sommeil, la poésie s'abstrait des raideurs de la pensée et des tensions qui tout le jour nouent la poitrine pour revenir au petit matin convenablement accordée, déliée en même temps que les muscles par le bain délicieux de la vie nocturne. Mettons donc à la porte de notre chambre à coucher ce qui pourrait empêcher le sommeil et accabler le travail de l'inconscient ; gardons-nous des liqueurs avant d'aller au lit ou de nourritures trop riches, salées en abondance ; ayons peut-être auprès de nous un petit livre de nouvelle philosophie ou de poésie expérimentale dont quelques pages nous assureront de dormir.


b) Préparation prochaine

Trop souvent, nous ne comprenons pas la nécessité de nous approcher progressivement du zénith de l'effort poétique. Cet effort, en provoquant une musculation et une élongation de la conscience, entraîne une vibration accélérée des gaines de l'esprit et un échauffement des nerfs physiques. De là la sensation d'irritation extrême que nous ressentons lorsqu'une femme débagoule ou qu'un enfant couine à côté de nous alors que nous sommes plongés en pleine poésie. Nous ne devons pas gravir trop vite la Montagne Intérieure. Mieux vaut s'assouplir d'abord par un brin de lecture et de réflexion. Après la poésie, revenons tout aussi tranquillement à la vie ordinaire. Ouvrons les yeux, demeurons quelques instants dans l'isolement de façon à retomber sans danger des cimes aiguës de la poésie.


c) Posture et emplacement

La posture et l'emplacement sont des attelles précieuses, bien qu'accessoires. Une grande pièce vidée de ses meubles et de tous les objets d'où émanerait une mauvaise influence sera utilisée avec profit pour l'activité poétique. Mais si l'élection d'un lieu occasionne des remarques désobligeantes ou de l'animosité chez les autres, notamment au bureau, où les ennemis de la poésie pullulent, mieux vaut s'en passer. On se repliera alors sans tergiverser aux cabinets, laissant accroire à qui voudrait que nous nous délivrons d'une pierre dans l'eau malpropre alors que c'est un oiseau coloré qui s'envole.

L'ancienne posture poétique consistait à s'asseoir par terre, puis à s'élever sur les mains, les jambes croisées derrière la nuque. Ainsi faisaient les scribes égyptiens et les bardes celtes. Cette position, quand elle est bien prise, est très confortable, car l'épine dorsale est libre, et le corps se balance en appui sur les poignets, ce qui provoque un léger effarement tandis qu'on pense ou qu'on déclame. La poésie suscite une circulation vigoureuse du sang dans les veines et des chocs électriques qui parcourent l'enveloppe. C'est pourquoi elle constitue en plus une saine pratique au plan physique ; et la position ancienne la favorise. Mais il est vrai que celle-ci peut être pénible à l'occidental aux os raides et au dos tordu par la scoliose. Dans ce cas, il n'y a pas à hésiter : qu'on choisisse plutôt une posture qui permette l'oubli du corps. La poésie sera toujours meilleure dès lors qu'on diminue la tension nerveuse, car il ne faut pas faire de poésie seulement avec nos nerfs, au risque de reproduire les dérives dangereuses pour soi et autrui d'un Antonin Artaud ou d'autres poètes physiques.

La poésie ne peut se faire après un repas gras. On bannira donc les buffets copieux offerts aux "pensionnaires" en "résidence" et les cocktails princiers aux frais du contribuable organisés à tout propos par les institutions. La raison en est que les énergies poétiques se divisent alors facilement vers les voies digestives pour donner ce qu'on appelle de la "poésie de merde" (mais il est vrai que d'aucuns, dans nos époques troublées, se gavent volontairement pour pouvoir faire des saletés dont ils badigeonnent ensuite des plaquettes qu'ils réussissent à faire passer pour de la "poésie abstraite").

Le moment idéal pour la poésie est usuellement le début de matinée. Le ton est donné pour le reste de la journée. Si vous n'avez pas d'autre plage à disposition, asseyez-vous dans votre lit tous les matins pour pratiquer durant une dizaine de minutes. Si au départ, durant la poésie, une sensation de douleur intense se fait sentir au cerveau, arrêtez immédiatement. C'est le signe d'un surmenage des cellules cérébrales qui ne sont pas encore habituées à l'effort. Les repentis de la poésie sonore, les jeunes dépressifs dans les écoles d'art et les drogués de longue haleine ressentiront souvent ce type d'ennui, car leurs pratiques respectives et leurs conditions d'existence sont éminemment destructrices des cellules cérébrales les plus fines. Si un retour à la vraie vie est possible, attendez que le temps remédie lentement à ce pénible état des choses.

La poésie ne doit jamais être trop prolongée. Au début, limitons-nous à quinze minutes ou une demi-heure. Cinq minutes de poésie chaque jour valent toujours mieux qu'une heure une fois la semaine. Autrement, il faut éviter de pratiquer entre dix heures du soir et deux heures du matin, car les déclamations pourraient éveiller les voisins ; et la police, lorsqu'elle se pointe, manque de compréhension si elle a été dérangée par de la poésie qu'elle prendra systématiquement pour de l'agitation politique.


d) Le processus poétique

Asseyons-nous, prêt pour la poésie. Après nous être baigné et parfumé, si possible. Fermons les yeux pour tenir à l'écart les distractions extérieures, et rappelons-nous l'objet de nos efforts qui consiste à devenir beau. Avec la poésie nous sommes plus forts. L'amour et la gloire pénètrent notre nature. Il est temps à présent de s'expliquer avec les mots que Dieu nous a donnés. Si pendant la poésie des bruits du dehors venaient à perturber notre conscience, ne nous laissons polluer par eux d'aucune façon. Chassons-les d'une main machinale. Que l'univers chante des cantilènes dans notre tête, mais que les oreilles extérieures restent entièrement fermées le temps de la séance.

L'essence de la poésie est dans la communion avec l'univers. Par la force de concentration, le coeur et l'entendement atteignent un peu de la Suprême Beauté qui irradie de l'univers. L'homme de poésie s'approche des étoiles. Il devient Un avec la Vie. Il peut apprendre à maîtriser la mort et, comme une idole souffrante, provoquer une douche de larmes dans les yeux des croyants.

Quand nous songeons à l'univers, si nous nous en rapprochons en imagination, un fragment d'infini nous pénètre qui éveille en nous une réponse émue. Nous ne pouvons concevoir les marques de la Beauté Céleste sans y répondre par une adoration qui trouve à s'exprimer à travers de la poésie. Si notre coeur arde et vibre, courons librement et jetons-nous dans la poésie. Si l'émotion ne naît pas tout de suite, si la réalisation tarde à venir, attendons patiemment et tendons encore nos efforts. En étant chaque matin en harmonie avec l'univers, en contemplant la source unique de chaque chose, nous nous imprégnons de la Beauté du Cosmos et nous finirons bien par en tirer des vers.

C'est pourquoi, après que la pensée et le coeur ont plané haut dans les régions supérieures de l'intelligence, restons quelque temps immobile, regardant, écoutant, aspirant... Imperceptiblement naîtra en nous la conscience d'une idée, d'une phrase, de quelque chose du Verbe venant en contact avec les pouvoirs naissants de l'âme. Ayons grand soin de serrer toujours près de nous de quoi écrire, car, lorsqu'il viendra, nous frappant tel la foudre, il faudra coucher tout de suite sur le papier le produit formidable de notre activité sublime.


e) La descente de la Montagne Intérieure

Quand nous sommes "revenus" et que nos yeux sont rouverts, restons paisiblement assis, et retournons en pensée à la poésie. Repassons les idées lumineuses qui nous sont venues, fixons-les. Prenons la résolution de leur faire porter tous leurs fruits. Offrons-les au peuple des hommes, aux morts, même aux bêtes. Rappelons-nous que la poésie soigne. Elle est un baume au coeur des êtres qui souffrent.

A la fin de la poésie, il est utile de prendre une ou deux inspirations profondes et calmes. Dérouillez vos genoux, faites des étirements. Vous pouvez maintenant reboutonner votre col, remettre un peu d'ordre dans votre vestiaire. Lorsque vous aurez repris entièrement vos esprits, vous irez vous désaltérer, prendre une collation, vaquer de nouveau à d'humaines occupations.



III. Résultats de la poésie


Nous avons déjà eu un aperçu des résultats de la poésie, mais il nous faut insister encore sur ce point pour bien comprendre la nécessité de s'y adonner régulièrement. Dans cette voie, deux erreurs sont à éviter, qui restent trop souvent commises.


a) Deux erreurs communes

La première erreur consiste à rechercher d'abord, comme résultat de la poésie, le développement de la sensitivité. Il est vrai que la concentration et l'aspiration de l'âme, en affinant les organes de la conscience et en agissant sur le corps, amènent quelquefois une sensitivité accrue. Il peut intervenir des visions, des couleurs et des sons exquis. Mais ce but ne doit pas être spécifiquement envisagé. Rappelons-nous le But Suprême : être beau, la gloire, les femmes. Si des épiphénomènes se produisent, utilisons-les pour l'inspiration et l'illumination qu'ils procurent. Certes, ces manifestations secondes peuvent nous apporter beaucoup ; mais pendant la poésie, précisément, il s'agit pour une part d'exclure les perceptions sensorielles, ceci afin d'atteindre l'unité avec le cosmos qui est au-delà du plan physique.

Une deuxième erreur consiste à attendre de la poésie un sentiment d'élévation spirituelle, voire de sainteté. Cela se produira sans doute, mais si aucun stigmate, aucune auréole ne survient immédiatement, n'en concluons pas pour autant que notre poésie est stérile. Qu'elle n'a pas ému les créatures du Ciel. Quantité de raisons, dont quelques unes liées au poids de notre chair, peuvent expliquer pourquoi nos aspirations ne semblent pas avoir eu d'écho dans les sphères de l'Au-delà. Cet écho existe, pourtant, à coup sûr. Et ce sera un témoignage splendide de notre sincérité que de poursuivre nos tentatives même à défaut du sentiment d'élection qu'ont eu avant nous quelques grands poètes martyrs.


b) Les véritables résultats

A un certain niveau, tous les aspirants, même des poètes aguerris, ont connu des périodes d'aridité, de "nuit obscure de la création". De brèves périodes de sécheresse traduisent un ajustement du corps, une adaptation des nerfs au travail rapide d'affinement qu'impose à l'homme l'activité poétique. Il ne faut pas s'en préoccuper outre mesure, se concentrant uniquement sur les vrais résultats de la poésie qui ne manqueront pas d'arriver.

En outre, parmi nous, il en est trop qui se laissent entraîner par la roue de l'activité créatrice incessante, par narcissisme ou par peur de perdre le bénéfice d'un acquit. Ils n'apprennent pas ce faisant à communier intimement avec l'univers, avec la Vie, dont le poète n'est pourtant que le fils et l'agent. Cette méprise doit amener tôt ou tard une banqueroute poétique complète. Souvent, c'est là qu'il faut chercher le motif pour lequel nous ne parvenons pas à passionner le public pour nos visions fabuleuses. Ce dont nous avons besoin, pour notre labeur, ce n'est pas d'une activité fiévreuse, mais d'une plus grande application, d'une intensité plus profonde et souterraine pour fertiliser l'oeuvre qui nous incombe.

Les véritables résultats de la poésie se manifestent lentement, imperceptiblement. Faites un examen rétrospectif au bout de six mois ou d'un an et vous observerez la métamorphose : de boiteux et mesquins qu'ils étaient au départ, vos vers deviennent plus amples, plus formés, et vos visions plus délicates, plus pures ; et plus évidente est l'intense Beauté qui se dégage de vous : votre visage fascine et séduit ; votre corps émeut ; vos pieds foulent des coeurs qui sans arrêt se jettent sous eux pour leur faire un tapis soyeux.


c) Obstacles à la poésie : les conditions extérieures

A la vérité, les circonstances extérieures sont toujours le moindre obstacle. Peut-être vivons-nous dans une famille minable où ne ne possédons pas même une chambre ni un petit coin qui nous soit réservé : ne faisons pas le fier, cherchons alors une place de commis de magasin ou d'ouvrier d'usine et profitons ainsi des quatorze ou seize heures bénéfiques au cerveau où il se vide pour se remplir ensuite des images merveilleuses que nous dispense généreusement la Vie.

A la maison, la femme ou les enfants, s'ils ont le caractère vraiment nocif qu'occasionne souvent le manque de pain, feront des objections ou essaieront de nous humilier s'ils s'aperçoivent que nous nous replions en solitaire pour cultiver dans le secret un jardin poétique. Indiquons-leur gentiment, mais fermement, que nous ne sommes pas disposé à supporter leurs baves. Rappelons-leur, poésie ou pas, que le maître à la maison reste celui qui a les plus grands poings. Que dans certains pays pas moins honnêtes on amuit dans le ruisseau les petits chiens qui bêlent trop fort et ne sont pas tout à fait utiles à personne. Nous éloignerons promptement, et sans grand dommage, une critique assez peu positive.

Mais peut-être aussi souffrons-nous d'une infirmité physique. Dans ce cas, restons assis tranquillement dans notre chaise de souffrance. C'est une excellente discipline qui exacerbe les sentiments, et donne quelquefois une belle poésie par le filtre de nos états amers. On ne compte pas les handicapés célèbres, notamment mentaux, qui ont enrichi le monde de leur activité, comme par exemple Grand Corps Malade.


d) Obstacles à la poésie : les conditions intérieures

Les obstacles intérieurs sont mille fois plus graves. Le principal est l'orgueil, qui se manifeste chez l'homme de poésie d'assez curieuse façon, soit par de l'arrogance exagérée, soit par une haine de soi excessive. Il n'est pas rare d'ailleurs que les deux travers se conjuguent, car le poète en qui s'ancre l'orgueil et qui apprécie fort la lèche qui vient lui cirer le visage et les chaussures est aisément découragé par l'insuccès et même poussé par les succès d'un autre aux plus cruelles extrémités de corde.

De même l'angoisse, qui est la crainte d'un bien qui pourrait ne pas nous échoir, ou d'un soit-disant mal qui risque de nous affecter, fait aussi partie des barrières qui bouchent la course altière de notre poésie. Aussi longtemps que nous serons torturés dans notre coeur, nous ne pourrons faire confiance à la Vie à la surface de laquelle toute poésie écume. Et nous n'arriverons pas, par le Verbe qui sort de la bouche et des yeux, à chahuter les foules.


e) Lecture et déclamation

La pratique de la lecture et de la déclamation publiques a toujours été l'auxiliaire de la poésie comme les bâtons et les sifflets le sont de la police car il faut bien que l'art se manifeste. Utilisée correctement, cette pratique est en tout cas un moyen inégalable d'exhausser et de développer notre art poétique.

Chaque jour ou chaque semaine, nous devrions passer en revue les poésies qui nous sont venues, et tester leurs effets sur un auditoire. Si vous le pouvez, observez quels sont les résultats de votre activité sur le bonheur et le bien-être des femmes. C'est un excellent baromètre. Scrutez les réactions, impitoyablement. Notez quand les respirations s'accélèrent, que l'une ou l'autre des auditrices aura mouillé ses yeux, mis la main à son coeur, menacé tout son monde d'entrer en apoplexie. Si tel est le cas, vous saurez que vous êtes sur le sentier lumineux. Souvenez-vous toujours de l'éveil à la passion et au désir que vous souhaitez provoquer sur votre public. S'il n'y a pas de femme autour de vous, essayez vos pouvoirs sur les animaux ou même sur les plantes. L'important est qu'un être vivant s'imprègne des grâces que vous lui dites.

Si vous n'avez vraiment personne, entraînez-vous devant une glace. Lorsque vous aurez cessé de reconnaître votre reflet, que vous aurez troublé la surface du miroir de la caresse de vos empreintes et de l'haleine de vos baisers, vous saurez qu'en matière de poésie vous êtes un homme réussi.


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Et c'est ainsi, à travers l'aiguisoir de la poésie, que chacun devrait chercher à affûter les pouvoirs de l'âme et du corps pour vivre en totale harmonie avec l'univers.

8 commentaires:

  1. Témoignage spontané:

    "Avant, j'étais soumis aux affres de cette poésie "réflexe", esclave de ces comportements moutonniers que nous avons tous vécu un jour ou l'autre, errant dans les méandres d'une vie et d'une flore intestinale erratiques. Laid et pétomane, les gens me crachaient au visage.

    Mais grâce aux conseils avisés du docteur Brea et à sa méthode révolutionnaire, je suis devenu un autre homme et ma vie a entièrement changé. Les femmes se prosternent, les enfants me respectent, je vibre à l'unisson avec mère Nature, je peux sentir les muses lécher tendrement mes oreilles et je déclame à tue-tête sans le moindre ballonnement. Je suis devenu un véritable poète. Merci Docteur Brea".

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  2. Merci de ce témoignage, mon cher Oslo.

    Il est vrai que votre cas était difficile, vos troubles ancrés très fortement en profondeur, et la convalescence a été longue.

    C'est courageux à vous de témoigner à visage découvert.

    Si vous aussi, vous souhaitez comme Oslo bénéficier de conseils et d'une assistance personnalisés, écrivez-moi pour prendre un rendez-vous.

    consultations par téléphone ou à mon cabinet. je me déplace aussi à domicile.

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  3. bravo cher antoine brea pour ce beau texte

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  4. Très bon texte effectivement, mais qu'aurait pensé Hölderlin ?
    Lui pour qui la poésie était justement cette forme d'ascèse (ou d'élévation) que tu moques.

    Ceci dit, le texte a une très belle densité et il est d'un bel équilibre coupant.

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  5. J'imagine qu'il aurait ronchonné un peu, mais au final on aurait fumé des kilos d'herbe et je suis sûr qu'on se serait quittés bons amis.

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  6. Je suis pas d'accord avec tout, mais c'est un morceau.

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  7. Merci pour cette dernière remarque, j'apprécie.

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  8. Mais que serions-nous sans la poésie ? (et que serait nous)
    Bizarrement montrer en face ne suffit pas, la poésie pointe toujours derrière.

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pan ! pan !