14 octobre 2011
Sur Tony Duvert, sur Marie-Laure Dagoit, sur Pompéi
"Les nuées ardentes sont parmi les phénomènes volcaniques les plus dangereux en raison de leur fort pouvoir destructeur, de la soudaineté de leur apparition et de leur vélocité élevée, qui laisse peu de possibilités de fuite. De plus, aucune protection passive ne s'avère efficace."
Jacques-Marie Bardintzeff, Le Grand livre des volcans du monde
Tony Duvert, ce météore, a dit quelque part que "l'oeuvre, présence simple, réclame simplement la présence de l'autre, et non sa fascination humiliée. Lire, voir, entendre, c'est être là, et être égal – ou le devenir."
Toute littérature un peu vivante tend à l'échange, au dialogue, éventuellement à la confrontation – non pas à la hauteur ou à la distance, non pas au développement d'une langue glacée et méprisante qui voudrait uniquement enduire de ses baves l'interlocuteur.
Toute littérature réelle suppose le respect, l'égalité, la loyauté dans les rapports de l'auteur et son vis-à-vis – ce qui n'empêche naturellement pas la violence.
Or, tout ce qui s'écrit aujourd'hui, surtout en France, consiste à peu près dans l'inverse : paroles profuses et vides, langues profondes qui vous fouissent les orifices pour y enfoncer un discours vantard mais nul, extrêmement empoisonné quoique seulement soporifique.
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Tony Duvert, cet aérolithe, a dit encore que "l'obscène de la pornographie est toujours approbation du corps, apparition trop vive. Seule est tolérée cette complète occultation du corps que l'on appelle l'érotisme. Car, de l'un à l'autre, c'est la différence entre le sale et le propre, le réel et le transfiguré ; est 'obscène' ce qui paraît littéral, est 'érotique' ce qui a été ennobli par les poncifs bourgeois."
Cela dit, toute pornographie je crois n'est pas bonne, qui souvent se limite à explorer les bords de la logique spectaculaire-marchande, la reproduisant sous une forme juste un peu déviée. Mais il y a une pornographie qui réinvente le corps, le réorganise, lui fait subir on ne sait quelles métamorphoses, le détruit quelquefois, ou lui redonne au contraire de son lustre, de sa réalité, de sa dangerosité ; une pornographie qui déçoit le désir du spectateur ou du lecteur lambda car il ne reconnaît plus rien de l'objet lisse et bête qu'ordinairement il consomme.
La pornographie devient alors lieu de subversion : elle attaque le corps, l'homme, ses normes sexuelles, sa société. Elle parle de réformer l'économie générale des plaisirs et ne duplique plus seulement l'univers intime admis.
Elle joue en cela le rôle de nuée ardente sous quoi une nuit s'affole Pompéi.
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Ce sont ces quelques convictions dont j'ai le sentiment qu'elles peuvent guider la lecture du petit livre infernal, volcanique et fabuleux que Marie-Laure Dagoit adresse directement – ou, pour mieux dire, nommément – à chacun de ses lecteurs : Ardente Nuvem.
J'y vois pour ma part un dialogue ardemment pornographique, dans le beau sens des termes.
La preuve en images :
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Oui, dès lors que la pornographie est vraiment une bataille pour réveiller le dragon, sinon c'est surtout de l'hygiène.
RépondreSupprimerMais vous le savez forcément, puisque vous écrivez.
Signé : Un lecteur.