les pauvres ne sont pas comme nous. les pauvres ne sont pas comme nous et le fardeau certainement leur incombe. les prêtres le disent. les scientifiques l’attestent. les politiques pareil. les politiques depuis que c'est fini le temps des pauvres qui nous terrorisaient l’âme. depuis que les riches sont redevenus de vrais beaux riches gagnants et triomphants. les bandes de pauvres de leur côté en restent comme deux ronds de flan. tristes comme tout. laids à voir. ils ne comprennent rien de ce qui arrive. nous les riches on comprend. on sait que c'est comme ça que marche l'économie : il faut des pauvres pour faire exister les riches ; il faut des pauvres mais que chacun reste à sa place. il en va de la répartition des charges dans une société qui marche comme de celle des instruments propitiatoires au sein d'une paroisse de village : il y a les choeurs d'enfants et les orgues doux qui doivent emplir l'église comme du benjoin pour faire monter la supplique des fidèles, et il y a les ocarinas aussi qui sont comme la prière des pauvres, mais c'est mieux si les ocarinas se maintiennent au-dehors pour jouer seulement lors des chahuts et à la fête des fous. les pauvres eux n'entendent rien à tout ça, ou feignent d'ignorer. ils s'en rincent les mains et ne préfèrent pas s'y aiguiser la pensée. feignasses ou bébêtes les pauvres, ils ne réfléchissent pas ni ne triment pas pour leur salut. après tout ça les regarde. mais ils suffoquent ensuite de rester tristes et laids à marner dans le dénuement. les pauvres sont tous tristes et salement laids par les temps qui galopent. et les pauvresses c'est pire. avant on en connaissait de jolies, du temps où elles nous faisaient peur. du temps où sous une branche et devant la figure elles venaient nous agiter les cordes. mais les pauvres désormais sont là, mâles et femelles, à faire mine de s'épouvanter d'être tournés si laids et repoussants que c'est une torture pour la vue. et cependant ils ne font rien pour essayer comme des bons riches de se creuser une tombe fraîche au soleil. curieux quand même que cette mentalité des nouveaux pauvres. c'est comme s'ils préféraient vivoter toujours dans des galeries humides sous des banlieues que personne d'humain n'habiterait et qui en plus sentent l'ambulance. et le corps des pauvres lui-même finit par sentir l'ambulance malgré qu'ils se le frottent régulièrement à la javel. et c'est ainsi que l'odeur d'ambulance s'accroche au cul des pauvres en même temps que l'odeur de gnôle dont la plupart en vérité s'ivrognent. car ils s'ivrognent la nuit les pauvres pour s'endormir et ne pas subir les rêves puisqu'ils ne savent pas se défendre des tombers du soleil. nous les riches nous saurions, le soleil n'a rien à nous refuser. et ils s'imbibent l'âme les pauvres à coups de gnôle pour mieux se l'assouplir parce qu'elle leur pique et qu'elle les gêne aux entournures. à la gnôle de la sorte ils s'effilochent le blanc des os, et ils s'attendrissent le cœur, et ils s'éblouissent la petite peau fine qui recouvre le blême des yeux – sans doute pour se désémouvoir et ne pas avoir à se dévisager. ils feraient mieux pourtant d'apprendre à se regarder en miroir les pauvres, à voir en vrai à quoi ça ressemble un pauvre : cet air de plouc empuanti de gnôle, de nuit et d'ambulance. au lieu de ça ils ne s'examinent pas, ils tombent souvent malades et dans l'ensemble ils boitent. c'est comme une seconde nature que d'être malade chez le pauvre, que de boquillonner salement sur une jambe inégale qu'on s'est cassée des suites d'une colique alcoolique. ça maigrit facilement un pauvre, à cause de ces maladies ataviques qu'on se transmet bourré de père en fille. qu'on se transmet à force de s'embrasser. car les pauvres s'embrassent en famille et ça ne dérange pauvre ni pauvresse de s'asseoir nu à la table du père. chez le pauvre on se met nu dans les lits et on s'embrasse sans même d'un mouchoir se couvrir la pudeur du visage. à mon avis les pauvres s'amaigrissent à s'embrasser comme ça : tout le vide qui les remplit, ils le rendent au soleil – et au soleil nous on les voit. si on les écoutait ils passeraient toute leur vie au lit à s'embrasser et à rendre du vide au soleil. il ne faut pas les laisser s'embrasser comme ça, chacun sa guise se tripatouiller les mauvais endroits. car il y a un dieu, il y a une morale, il y a une propreté. et c'est encore heureux que nous les riches soyons là pour forcer les pauvres de temps à autre à s'élever vers des œuvres plus pies. il faut tordre la méchanceté du pauvre, l'obliger à laver le fond de son cœur où gît l'ordure. à nous les riches l'ordure du pauvre infiniment nous dégoûte. et nous dégoûte aussi cette façon de mourir jeune qu'il ont sans que jamais la peur ne les terrasse. les pauvres meurent et s'en foutent. ils ne sont pas comme nous, harcelés des hantises de l'excavation. ils ne se traînent pas à genoux devant les prêtres. quand on leur dit ils crient que dieu suffit sans les intercessions – mais que savent-ils en matière de vraie foi. les pauvres meurent souvent, la nature est bien faite. ils meurent mais ils sont prolifiques. ils devraient continuer de mourir, mais au moins prendre un air contrit. nous épargner leur sale spectacle, mais ne pas raviver chez nous les vieilles douleurs métaphysiques. ne pas nous attiser l'idée d'un catch inévitable au seuil du caveau, organisé derrière l'église par une bande de truqueurs armés d’une pelle. mais les pauvres sont remplis de suffisance par leur histoire, ils aiment à défiler en grands exploits de viande qui tient debout toute seule. les pauvres aiment à nous provoquer et nous remplir d'effroi, ils espèrent que nous nous sentirons coupables. que nous les riches un jour aurons à souffrir à leur place. les pauvres ont perdu le goût du riche, ils souhaiteraient que comme une armée de christs nous expiions les fautes communes. et ils se tireraient les entrailles du sein pour nous les exposer en procession s'ils étaient sûrs ainsi de nous intéresser. seulement nous les riches avons déjà suffisamment de problèmes à s'occuper. et puis nous les riches avons déjà toutes nos vedettes de cinéma pour porter le cilice de nos péchés ; et nous avons ces marchandises aussi dont on façonne la cire puis qu'on dévore en holocaustes ; et il y a ces allocations gratuites enfin qu'on vend aux pauvres pour faire tenir le monde et faire tourner l'économie. les pauvres eux ne comprennent pas tout ça, qui n'ont pas le sens métaphysique. les pauvres ne comprennent rien à rien, qui sont pollués des démons de l'impéritie. ils n’ont pas lu les romans russes. ils ne savent que se plaindre du chômage qui pourtant les modère, de leur vie misérable mais sans remous. ils ne savent qu'agiter de vieilles lunes dévalorisées tandis qu'ils devraient se réjouir de l'existence et nous bénir. car nous les riches travaillons pour que même le pauvre vive dans un monde bien ordonné et qui tient bon son axe. les pauvres ne se rendent pas compte de la peine que ça occasionne. ils se repaissent d'allocations et de la pitance qu'on leur jette mais pour le reste ils nous méprisent. au final ça ne fait rien, ça n'a pas d'importance. on ne fait pas d'omelettes sans crever des yeux. car dieu nous a élus et nous habite et c'est ce que nous croyons. c'est ce que le dimanche les prêtres disent dans leurs formules. c’est ce que les scientifiques ont calculé. en vérité nous les riches croyons volontiers les prêtres ou même les scientifiques ce qui est naturel, mais nous ne comprenons plus les pauvres d'aujourd'hui. c'est comme si on n'entendait plus ce qu'ils disent. parfois un pauvre tend la main au sortir de l'office, on le regarde, on se demande ce qu'il réclame. on le voit s'ouvrir en grand la gorge et faire des bulles, mais l'air qui sort n'a aucun sens et les lèvres de sa blessure sont tant épaisses qu'on n'y peut guère lire. quand on lui jette une pièce le pauvre ne lève pas un cil. il ne fait plus rien comme avant. il ne dit plus merci en nous baisant les mains ou l'ourlet du manteau. il faut absolument faire reparler les pauvres. leur savonner la langue. ne pas les laisser s'étouffer avec des mots malades qui leur bouffissent l'intérieur du bec. les politiques le disent. les prêtres sont d'accord. les scientifiques l’ont confirmé par tout un tas de subtiles expériences complexes. ne plus perdre son temps à écouter ce qui n'est que bêtes et cris.
23 novembre 2007
Bêtes et cris
les pauvres ne sont pas comme nous. les pauvres ne sont pas comme nous et le fardeau certainement leur incombe. les prêtres le disent. les scientifiques l’attestent. les politiques pareil. les politiques depuis que c'est fini le temps des pauvres qui nous terrorisaient l’âme. depuis que les riches sont redevenus de vrais beaux riches gagnants et triomphants. les bandes de pauvres de leur côté en restent comme deux ronds de flan. tristes comme tout. laids à voir. ils ne comprennent rien de ce qui arrive. nous les riches on comprend. on sait que c'est comme ça que marche l'économie : il faut des pauvres pour faire exister les riches ; il faut des pauvres mais que chacun reste à sa place. il en va de la répartition des charges dans une société qui marche comme de celle des instruments propitiatoires au sein d'une paroisse de village : il y a les choeurs d'enfants et les orgues doux qui doivent emplir l'église comme du benjoin pour faire monter la supplique des fidèles, et il y a les ocarinas aussi qui sont comme la prière des pauvres, mais c'est mieux si les ocarinas se maintiennent au-dehors pour jouer seulement lors des chahuts et à la fête des fous. les pauvres eux n'entendent rien à tout ça, ou feignent d'ignorer. ils s'en rincent les mains et ne préfèrent pas s'y aiguiser la pensée. feignasses ou bébêtes les pauvres, ils ne réfléchissent pas ni ne triment pas pour leur salut. après tout ça les regarde. mais ils suffoquent ensuite de rester tristes et laids à marner dans le dénuement. les pauvres sont tous tristes et salement laids par les temps qui galopent. et les pauvresses c'est pire. avant on en connaissait de jolies, du temps où elles nous faisaient peur. du temps où sous une branche et devant la figure elles venaient nous agiter les cordes. mais les pauvres désormais sont là, mâles et femelles, à faire mine de s'épouvanter d'être tournés si laids et repoussants que c'est une torture pour la vue. et cependant ils ne font rien pour essayer comme des bons riches de se creuser une tombe fraîche au soleil. curieux quand même que cette mentalité des nouveaux pauvres. c'est comme s'ils préféraient vivoter toujours dans des galeries humides sous des banlieues que personne d'humain n'habiterait et qui en plus sentent l'ambulance. et le corps des pauvres lui-même finit par sentir l'ambulance malgré qu'ils se le frottent régulièrement à la javel. et c'est ainsi que l'odeur d'ambulance s'accroche au cul des pauvres en même temps que l'odeur de gnôle dont la plupart en vérité s'ivrognent. car ils s'ivrognent la nuit les pauvres pour s'endormir et ne pas subir les rêves puisqu'ils ne savent pas se défendre des tombers du soleil. nous les riches nous saurions, le soleil n'a rien à nous refuser. et ils s'imbibent l'âme les pauvres à coups de gnôle pour mieux se l'assouplir parce qu'elle leur pique et qu'elle les gêne aux entournures. à la gnôle de la sorte ils s'effilochent le blanc des os, et ils s'attendrissent le cœur, et ils s'éblouissent la petite peau fine qui recouvre le blême des yeux – sans doute pour se désémouvoir et ne pas avoir à se dévisager. ils feraient mieux pourtant d'apprendre à se regarder en miroir les pauvres, à voir en vrai à quoi ça ressemble un pauvre : cet air de plouc empuanti de gnôle, de nuit et d'ambulance. au lieu de ça ils ne s'examinent pas, ils tombent souvent malades et dans l'ensemble ils boitent. c'est comme une seconde nature que d'être malade chez le pauvre, que de boquillonner salement sur une jambe inégale qu'on s'est cassée des suites d'une colique alcoolique. ça maigrit facilement un pauvre, à cause de ces maladies ataviques qu'on se transmet bourré de père en fille. qu'on se transmet à force de s'embrasser. car les pauvres s'embrassent en famille et ça ne dérange pauvre ni pauvresse de s'asseoir nu à la table du père. chez le pauvre on se met nu dans les lits et on s'embrasse sans même d'un mouchoir se couvrir la pudeur du visage. à mon avis les pauvres s'amaigrissent à s'embrasser comme ça : tout le vide qui les remplit, ils le rendent au soleil – et au soleil nous on les voit. si on les écoutait ils passeraient toute leur vie au lit à s'embrasser et à rendre du vide au soleil. il ne faut pas les laisser s'embrasser comme ça, chacun sa guise se tripatouiller les mauvais endroits. car il y a un dieu, il y a une morale, il y a une propreté. et c'est encore heureux que nous les riches soyons là pour forcer les pauvres de temps à autre à s'élever vers des œuvres plus pies. il faut tordre la méchanceté du pauvre, l'obliger à laver le fond de son cœur où gît l'ordure. à nous les riches l'ordure du pauvre infiniment nous dégoûte. et nous dégoûte aussi cette façon de mourir jeune qu'il ont sans que jamais la peur ne les terrasse. les pauvres meurent et s'en foutent. ils ne sont pas comme nous, harcelés des hantises de l'excavation. ils ne se traînent pas à genoux devant les prêtres. quand on leur dit ils crient que dieu suffit sans les intercessions – mais que savent-ils en matière de vraie foi. les pauvres meurent souvent, la nature est bien faite. ils meurent mais ils sont prolifiques. ils devraient continuer de mourir, mais au moins prendre un air contrit. nous épargner leur sale spectacle, mais ne pas raviver chez nous les vieilles douleurs métaphysiques. ne pas nous attiser l'idée d'un catch inévitable au seuil du caveau, organisé derrière l'église par une bande de truqueurs armés d’une pelle. mais les pauvres sont remplis de suffisance par leur histoire, ils aiment à défiler en grands exploits de viande qui tient debout toute seule. les pauvres aiment à nous provoquer et nous remplir d'effroi, ils espèrent que nous nous sentirons coupables. que nous les riches un jour aurons à souffrir à leur place. les pauvres ont perdu le goût du riche, ils souhaiteraient que comme une armée de christs nous expiions les fautes communes. et ils se tireraient les entrailles du sein pour nous les exposer en procession s'ils étaient sûrs ainsi de nous intéresser. seulement nous les riches avons déjà suffisamment de problèmes à s'occuper. et puis nous les riches avons déjà toutes nos vedettes de cinéma pour porter le cilice de nos péchés ; et nous avons ces marchandises aussi dont on façonne la cire puis qu'on dévore en holocaustes ; et il y a ces allocations gratuites enfin qu'on vend aux pauvres pour faire tenir le monde et faire tourner l'économie. les pauvres eux ne comprennent pas tout ça, qui n'ont pas le sens métaphysique. les pauvres ne comprennent rien à rien, qui sont pollués des démons de l'impéritie. ils n’ont pas lu les romans russes. ils ne savent que se plaindre du chômage qui pourtant les modère, de leur vie misérable mais sans remous. ils ne savent qu'agiter de vieilles lunes dévalorisées tandis qu'ils devraient se réjouir de l'existence et nous bénir. car nous les riches travaillons pour que même le pauvre vive dans un monde bien ordonné et qui tient bon son axe. les pauvres ne se rendent pas compte de la peine que ça occasionne. ils se repaissent d'allocations et de la pitance qu'on leur jette mais pour le reste ils nous méprisent. au final ça ne fait rien, ça n'a pas d'importance. on ne fait pas d'omelettes sans crever des yeux. car dieu nous a élus et nous habite et c'est ce que nous croyons. c'est ce que le dimanche les prêtres disent dans leurs formules. c’est ce que les scientifiques ont calculé. en vérité nous les riches croyons volontiers les prêtres ou même les scientifiques ce qui est naturel, mais nous ne comprenons plus les pauvres d'aujourd'hui. c'est comme si on n'entendait plus ce qu'ils disent. parfois un pauvre tend la main au sortir de l'office, on le regarde, on se demande ce qu'il réclame. on le voit s'ouvrir en grand la gorge et faire des bulles, mais l'air qui sort n'a aucun sens et les lèvres de sa blessure sont tant épaisses qu'on n'y peut guère lire. quand on lui jette une pièce le pauvre ne lève pas un cil. il ne fait plus rien comme avant. il ne dit plus merci en nous baisant les mains ou l'ourlet du manteau. il faut absolument faire reparler les pauvres. leur savonner la langue. ne pas les laisser s'étouffer avec des mots malades qui leur bouffissent l'intérieur du bec. les politiques le disent. les prêtres sont d'accord. les scientifiques l’ont confirmé par tout un tas de subtiles expériences complexes. ne plus perdre son temps à écouter ce qui n'est que bêtes et cris.
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